chirurgie
CHIRURGIE INTESTINALE
comment réduire mortalité et morbidité
comment réduire mortalité et morbidité
Theresa Fossum est une star de la chirurgie. Professeur et titulaire de la chaire Joan Read en chirugie vétérinaire, directrice du service de chirurgie cardiothoracique à l'institut Michael E DeBakey à l'université du Texas, entre autres responsabilités. Ses conférences sont brillantes sans être hors de portée, et ses "trucs et astuces" sont de nature à améliorer nos compétences au quotidien. Incidemment, elle est capable d'ouvrir un cœur de chien avec 5 bouts de ficelle pour y retirer une masse en moins de 3 minutes (parce qu'elle n'aime pas les appareils de circulation extra-corporelle) et d'assurer une conférence après une nuit passée à faire la fête ! Respect. |
❚ Conférence présentée par Theresa Fossum 7e congrès mondial d'Auckland, Nouvelle-Zélande (2013) |
Synthèse par Jean-Cristophe Vivier
● Le diagnostic d’une affection intestinale repose sur l'anamnèse, les signes cliniques, l'examen de l'animal et des examens d'imagerie (radiographie, échographie, endoscopie), de laboratoire (numération/formule, biochimie), et les biopsies (à pratiquer sur le bord antimésentérique). L'alimentation, des phases de stress, la réponse aux traitements éventuellement reçus, sont des éléments qui doivent être recueillis auprès des propriétaires.
● Les signes cliniques indiquant une affection intestinale sont peu spécifiques, malgré la fréquence de la perte de poids, de la diarrhée, des vomissements ou de l'anorexie. La douleur, l'état de choc, des vomissements incoercibles ou un abdomen aigu orientent vers un diagnostic de type perforation, occlusion haute, malposition intestinale ou infarctus.
● Les examens de laboratoire permettent d’orienter le diagnostic vers une autre affection (le diabète, une insuffisance rénale ou hépatique, une pancréatite, une hyperadrénocorticisme, ...) afin d'adapter la gestion du pré-opératoire.
● La déshydratation, les déséquilibres acido-basiques ou électrolytiques accompagnent fréquemment les vomissements et doivent être corrigés dans la mesure du possible avant l'anesthésie.
● L'hypotension est délétère car la vasoconstriction portale intense qu'elle entraîne détruit la barrière de mucus intestinal et augmente l'absorption des endotoxines.
● Si les vomissements entraînent le plus souvent une alcalose, on peut a contrario rencontrer une acidose métabolique si la déshydratation domine (vomissement, manque d'apport ou perte occulte), associée ou non à une consommation des réserves corporelles
Quand effectuer une transfusion ou administrer du plasma ?
● Une transfusion doit être pratiquée si l'hématocrite est inférieure à 20 p. cent ou si le chien est hypoxique ou très faible. Si l’affection est chronique, il convient d’apporter du sang total si le chien est déshydraté, ou des globules rouges dans le cas contraire. Les déficiences en facteur de la coagulation sont corrigées par du sang entier ou du plasma frais (ou fraîchement congelé !).
● L'administration de plasma (5-20 ml/kg), de soluté amyloïde ou de sang total doivent être envisagés avant la chirurgie si l'albuminémie est < à 1,5 g/dl. Si le chien souffre d'une importante entéropathie exsudative, l'administration de plasma est rarement efficace car l'albumine se retrouve rapidement dans le tractus gastro-intestinal ; préfèrer alors les colloïdes.
● Il est prouvé que la transfusion affecte la cicatrisation intestinale, et il est possible qu'elle augmente les risques de péritonite.
L’apport de l’imagerie
1. Les radiographies sans préparation face/profil peuvent montrer des images anormales (gaz, liquides, masses, corps étranger, épanchement, déplacement d'organe.
● Si le rapport entre le diamètre intestinal maximal et la hauteur de la facette articulaire antérieure du corps vertébral de la seconde vertèbre lombaire est > à 3, 70 p. cent de chance d'avoir affaire à une obstruction chez le chat (et 95 p. cent avec un ratio supérieur à 4).
● Les radiographies avec produit de contraste sont de moins en moins pratiquées en raison du recours plus fréquent à l'échographie et à l'endoscopie. L'utilisation de produit iodé permet néanmoins de confirmer une perforation intestinale si le lavage péritonéal et l'abdominocentèse ont échoué à confirmer une péritonite septique.
2. L'échographie peut détecter et définir les masses intestinales ou abdominales, évaluer l'épaisseur de la paroi (normalement 2-3 mm), l'aspect et la symétrie des différentes couches, le péristaltisme, l'aspect du contenu (interface gaz/liquide, mucus), la localisation de la lésion et son extension.
● Avec un bon échographe, cinq couches peuvent être visualisées :
- la surface de la muqueuse (hyperéchogène) ;
- la muqueuse elle-même (hypo) ;
- la sous-muqueuse (hyper) ;
- la musculeuse (hypo) ;
- la séreuse (hyper).
● La structure de l'intestin oriente le choix technique des biopsies : endoscopique si elle est homogène, chirurgicale, dans le cas contraire.
● Les procédures endoscopiques permettent la détection d'ulcères, de lymphangiectasie, d'infiltration de la muqueuse qui passent inaperçues à la radiographie ou à l'échographie, et bien sûr les biopsies à vue de l'estomac, du duodénum, voire du haut jéjunum, et de l'iléum, du colon de l'autre côté.
● La stabilisation de l'animal avant la chirurgie offre des avantages qu’il faut peser (balance risques-bénéfices).
Techniques : conseils pour le traitement chirurgical
● Les anastomoses doivent être termino-terminales.
- Pour ajuster deux parties de diamètre différents, faire une section perpendiculaire sur le plus gros, et une incision oblique (45 à 60 °) telle que le bord antimésentérique soit plus court que le côté mésentérique.
- Égaliser la muqueuse si elle éverse avant la suture.
Utiliser un monofilament 3-0 ou 4-0, points simples, traversant toutes les couches en prenant un peu plus de séreuse que de muqueuse.
Conseil : ne pas serrer plus que nécessaire pour mettre en contact les abouts, nœuds à l'extérieur. Les "crush suture" qui furent recommandées par Bojrab sont à proscrire.
- Poser en premier le point mésentérique, et en second l'antimésentérique pour prépositionner les abouts. Le point mésentérique est le plus difficile à faire à cause de la graisse ; statistiquement, c'est celui qui fuit ! On place les sutures tous les 2-3 mm si les deux lumières sont de même diamètre.
Dans le cas contraire, il faut espacer les sutures un peu plus côté large. Si la différence de diamètre est telle que l'angle de résection et l'espacement des sutures ne suffit pas à autoriser un affrontement termino-terminal, il est nécessaire d’enlever un angle (1 à 2 cm de long, 1 à 3 mm de large) du bord antimésentérique de l'intestin possédant la lumière la plus petite.
● Une fois l'anastomose réalisée, tester les fuites avec une solution isotonique injectée dans la lumière et mettre en pression doucement avec les doigts. On ferme le défaut mésentérique avec un surjet ou en points séparés, ...
En pratique :
- On a tous l'habitude d'empaqueter nos sutures dans du mésentère ... Il y a beaucoup plus efficace si l'on redoute une déhiscence ou une fuite, c'est la technique du "serosal patching". Celle-ci consiste à appliquer directement au-dessus de la suture ou de la portion dont la viabilité est douteuse le bord antimésentérique de l'intestin grêle, voire de l'estomac ou d'autres segments intestinaux, à l'aide d'une suture. Le patch apporte un support physique, une sécrétion de fibrine qui agit comme un joint, un contingentement de la fuite, un apport de sang, ...
Si l'on couvre une brèche viscérale, celle-ci se reconstitue en 8 semaines avec un épithélium muqueux.
- Theresa Fossum a même présenté un cas où un segment d'intestin quasi nécrotique et impossible à enlever était entièrement recouvert sur sa longueur et sa circonférence par plusieurs boucles intestinales.
- Quelques consignes pour réussir ces patches : ne pas traumatiser les segments en les étirant, les tordant ou les écrasant. Si l'on utilise plusieurs boucles, les préparer avant de les fixer sur le segment défectueux. Les sutures ne doivent pas pénétrer dans la lumière et doivent être posées en tissu sain. ❒
En pratique - Quand intervenir en urgence ? ou tout de suite ?
1. Si l’une ou plusieurs des conditions suivantes sont présentes, l’urgence opératoire est avérée :
- une plaie abdominale pénétrante ;
- plus de 25000 neutrophiles/µl, ou la présence de "neutrophiles toxiques" (neutrophile avec une chromatine décondensée et irrégulière) dans la cytologie de l'épanchement ;
- la présence de bactéries dans l'épanchement abdominal ;
- la différence de concentration en glucose entre le sang et l'épanchement est > à 20 mg/dl ;
- la concentration en lactate de l'épanchement est > à 2,5 à 5,5 mmol/l ;
- un volvulus ou une pneumopéritoine est repéré à l'imagerie ;
- une intussuception œsophagienne ou gastrique est détectée à l'imagerie ;
- une culture bactérienne est positive pour des pathogènes sur l'épanchement.
2. Il faut envisager d'opérer de suite si les facteurs précédant ne sont pas identifiés mais que un ou plusieurs des critères suivant est présent (tous ne sont pas aisément accessibles) :
- une cytologie de l'épanchement avec plus de 13000 cellules nuclées/µl) ;
- pH de l'épanchement < à 7,2 ;
- une pression partielle CO2 > à 55 mm
de mercure dans l'épanchement ;
- une pression partielle 02 < à 50 mg Hg ;
- une concentration en glucose < à 50 mg/dl ;
- une différence lactatémie/taux en lactate
de l'épanchement négatif ;
- l'état de l'animal se dégrade malgré une thérapeutique médicale agressive et adaptée, et une perforation, étranglement, nécrose ou sepsis sont soupçonnés.
1. Si l’une ou plusieurs des conditions suivantes sont présentes, l’urgence opératoire est avérée :
- une plaie abdominale pénétrante ;
- plus de 25000 neutrophiles/µl, ou la présence de "neutrophiles toxiques" (neutrophile avec une chromatine décondensée et irrégulière) dans la cytologie de l'épanchement ;
- la présence de bactéries dans l'épanchement abdominal ;
- la différence de concentration en glucose entre le sang et l'épanchement est > à 20 mg/dl ;
- la concentration en lactate de l'épanchement est > à 2,5 à 5,5 mmol/l ;
- un volvulus ou une pneumopéritoine est repéré à l'imagerie ;
- une intussuception œsophagienne ou gastrique est détectée à l'imagerie ;
- une culture bactérienne est positive pour des pathogènes sur l'épanchement.
2. Il faut envisager d'opérer de suite si les facteurs précédant ne sont pas identifiés mais que un ou plusieurs des critères suivant est présent (tous ne sont pas aisément accessibles) :
- une cytologie de l'épanchement avec plus de 13000 cellules nuclées/µl) ;
- pH de l'épanchement < à 7,2 ;
- une pression partielle CO2 > à 55 mm
de mercure dans l'épanchement ;
- une pression partielle 02 < à 50 mg Hg ;
- une concentration en glucose < à 50 mg/dl ;
- une différence lactatémie/taux en lactate
de l'épanchement négatif ;
- l'état de l'animal se dégrade malgré une thérapeutique médicale agressive et adaptée, et une perforation, étranglement, nécrose ou sepsis sont soupçonnés.
Modifié le: mardi 27 août 2013, 17:04