Retour
néonatalogie

néonatalogie


LE TRAITEMENT PAR LA CHALEUR DES COLOSTRUMS
DE HAUTE, MOYENNE ET BASSE QUALITÉ AUGMENTE L’EFFICACITÉ
de l’absorption des immunoglobulines G

Objectif de l'étude
 Évaluer l’effet du traitement
par la chaleur de différentes qualités
de colostrum sur l’absorption intestinale
des immunoglobulines G chez les veaux.

J. Dairy Sci, 2014;97:2355-60
Heat treatment of colostrum
increases immunoglobulin G
absorption efficiency in high,
medium and low quality colostrum.

Gelsinger SL, Gray SM, Jones CM, and Heinrichs AJ








Synthèse par Alice Assemat, T1 Pro, École nationale vétérinaire de Toulouse




Matériel et méthode

● Des colostrums de vaches de race Prim’Holstein appartenant à l’Université de l’état de Pennsylvanie (nombre non précisé) ont été prélevés et congelés à -20°C.
Après décongélation, les qualités des colostrums ont été évaluées au pèse-colostrum pour distinguer trois groupes :
- concentration élevée en Ig G (groupe A) : > 75 mg/mL ;
- concentration moyenne en Ig G (groupe B): < 75 mg/mL et > 60 mg/mL ;
- concentration basse en Ig G (groupe C) : < 60 mg/mL.
 Chaque groupe a ensuite été décongelé. Au sein de chacun d’eux, la moitié du colostrum a été chauffée à 60°C pendant 30 min, puis recongelé à -20°C, l’autre moitié a été directement recongelée à -20°C. Ainsi, six catégories de colostrums ont été obtenues.
 145 veaux de race Prim’Holstein (70 mâles et 75 femelles) ont chacun reçu 1,89 L de colostrum dans les 4 h suivant leur naissance, puis 1,89 L entre 4 et 8 h après la parturition. Cette quantité permet à chaque veau de recevoir un minimum de 100 g d’Ig G. Cette prise colostrale a été donnée soit au biberon soit à l’aide d’une sonde oesophagienne pour les veaux présentant des difficultés à téter. Le nombre de veaux nourris par sonde œsophagienne n’a pas été précisé dans l’étude.
 Sur chaque catégorie de colostrum, la qualité immunologique a été évaluée par la mesure de la concentration en Ig G1 et Ig G2 par immunodiffusion radiale. La qualité microbiologique a été définie par la quantification des germes SCP (staphylocoques à coagulase positive), coliformes et bacilles gram- non coliformes par culture.
 Pour chaque veau, des prélèvements sanguins ont été effectués 48 h après la naissance afin d’évaluer la concentration plasmatique en protéines totales (au réfractomètre), en Ig G (méthode
ELISA) et l’efficacité apparente de l’absorption des Ig G (définie comme concentration Ig G x volume plasmatique / Ig G apportés par le colostrum).

Résultats

 Le traitement par la chaleur du colostrum diminue la concentration en Ig G des colostrums de chaque groupe :
- perte de 6,5 mg/mL pour le goupe A ;
- perte de 0,9 mg/mL pour le groupe B ;
- perte de 3,8 mg/mL pour le groupe C.
 De plus, le chauffage élimine les coliformes et les bactéries gram –, et diminue significativement les SCP : élimination de 2,5 log cfu/mL pour le groupe A, 2,8 log cfu/mL pour le groupe B et 3,3 log ufc/mL pour le groupe C.
 Au vu des résultats, plus la teneur initiale en Ig G du colostrum est haute, et plus la concentration plasmatique en Ig G chez les veaux est élevée.
 Quelle que soit la teneur initiale en Ig G du colostrum, le chauffage entraîne une augmentation significative de la concentration plasmatique en Ig G et une meilleure efficacité de leur absorption chez les veaux :
- pour les concentrations plasmatiques en Ig G :
- gain de 4,2 mg/mL pour le groupe A ;
- gain de 4,4 mg/mL pour le groupe B ;
- gain de 1,5 mg/mL pour le groupe C ;
- pour l’efficacité de l’absorption :
- gain de 7,8 p. cent pour le groupe A ;
- gain de 3,3 p. cent pour le groupe B ;
- gain de 3,9 p. cent pour le groupe C.
 11 veaux ont présenté un défaut de transfert d’immunité passive (concentration plasmatique
en Ig G 48 h après la naissance < 10 mg/mL) : 11 nourris avec du colostrum de mauvaise qualité dont cinq traités à la chaleur, cinq nourris avec du colostrum de moyenne qualité dont deux traités à la chaleur, un nourri avec du colostrum de bonne qualité, traité à la chaleur.
 La concentration plasmatique en protéines totales augmente avec la concentration initiale en Ig G du colostrum :
- 80 mg/mL pour le groupe A ;
- 74 mg/mL pour le groupe B ;
- 68 mg/mL pour le groupe C.
Ainsi, il existe une corrélation positive entre la concentration plasmatique en Ig G et celle en protéines totales.
 L’effet de la chaleur est négligeable :
- perte de 1 mg/mL pour le groupe A ;
- gain de 1 mg/mL pour le groupe B ;
- gain de 6 mg/mL pour le groupe C.

Discussion et commentaires

 Le traitement par la chaleur du colostrum semble améliorer la teneur plasmatique en Ig G des veaux qui le consomment.
 Cependant, dans cette étude les modalités de la prise colostrale semblent peu contrôlées. En effet, l’influence de la prise du colostrum soit par sonde oesophagienne soit par tétée n’a pas été évaluée. De plus, l’heure de prise colostrale est imprécise : les veaux reçoivent le colostrum entre 0 et 4 h après leur naissance, puis entre 4 et 8 h. Or, la perméabilisation de la paroi digestive est très rapide.
 De plus, le choix de prendre dans l’étude à la fois des mâles et des femelles n’a pas été pris en compte dans les résultats de l’expérience. D’autres publications ont pourtant suggéré qu’il existait une différence entre les deux sexes concernant l’efficacité de l’absorption des Ig G.
 Les mesures consistent en l’évaluation des concentrations plasmatiques en Ig G et protéines
totales mais ces données ne permettent pas de conclure sur les performances des veaux : résistance aux maladies néo-natales, gain moyen quotidien, production laitière en première lactation. En effet, une meilleure concentration en Ig G n’implique pas forcément de meilleures performances si le seuil minimal en Ig G plasmatique est déjà atteint.
 L’importance de la prise précoce du colostrum en quantité et en qualité suffisante a déjà été démontrée.
Dans cette étude, parmi les veaux ayant souffert d’un échec de transfert de l’immunité passive, 47 p. cent avaient été nourris avec du colostrum chauffé.
 Ainsi, chauffer le colostrum ne permet pas de répondre efficacement à l’attente des élevages en France : diminuer le nombre d’échec de transfert d’immunité passive.
 On peut se demander si le fait de congeler, décongeler, chauffer, recongeler le colostrum
ne peut pas dégrader sa qualité par la dénaturation d’autres éléments constitutifs du colostrum.
Il serait donc intéressant de ne pas s’arrêter à la mesure des concentrations plasmatiques en Ig G et protéines totales mais d’étudier aussi la composition du colostrum après chauffage et les performances des veaux.
 Cette pratique en élevage en France parait possible mais nécessite un équipement adapté et une implication supplémentaire de la part de l’éleveur. Il paraît plus simple de donner plus de colostrum en respectant les limites physiologiques du veau que de le chauffer avant la tétée.
Modifié le: vendredi 27 février 2015, 18:36