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Cancérologie

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LE FUROSÉMIDE POUR PRÉVENIR LA CYSTITE HÉMORRAGIQUE STÉRILE
Chez les chiens recevant une chimiothérapie métronomique
avec du cyclophosphamide


Objectif de l'étude
Évaluer l’incidence des CHS
chez les chiens recevant
une chimiothérapie métronomique
à base de cyclophosphamide,
avec et sans furosémide.
Identifier des facteurs
de risque de développement
de cette affection.

Veterinary and Comparative Oncology
2017,1468-78
Setyo L, Ma M, Bunn T, Wyatt K, Wang P









Synthèse par Anaïs Prouteau doctorante en onco-génétique canine à l'IGDR
(Institut de Génétique et Développement de Rennes), équipe Génétique du Chien, 2 av du Pr Léon Bernard, 35 000 Rennes)


Le cyclophosphamide est un agent alkylant utilisé dans le traitement de certains cancers canins, comme le lymphome, ou certains carcinomes et sarcomes. Il est de plus en plus utilisé en chimiothérapie métronomique, c’est-àdire à faibles doses (10 mg/m2) journalières.
Le cyclophosphamide présente des effets secondaires communs aux autres traitements de chimiothérapie, comme la myélosuppression, des troubles gastro-intestinaux, ou l’alopécie, mais de façon plus spécifique, il peut induire l’apparition de cystites hémorragiques stériles (CHS). Ceci est dû à l’action inflammatoire de l’un de ses métabolites, l’acroléine, sur l’épithélium vésical.

Matériel et méthodes

Il s’agit d’une étude rétrospective menée par le service d’oncologie de la clinique vétérinaire de Perth, en Australie, concernant les chiens traités entre septembre 2009, et novembre 2015. Pour être inclus dans l’étude, les chiens devaient avoir reçu un traitement de chimiothérapie métronomique avec du cyclophosphamide, et bénéficier d’un suivi d’au moins 6 mois, sauf si la CHS avait été contractée avant.
Les chiens ayant reçu de la prednisolone, ou du cyclophosphamide à haute dose dans les 2 semaines avant le début du traitement, ou concomitamment étaient exclus de l’étude.
En présence de signes évocateurs (hématurie, strangurie, pollakiurie), les cliniciens ont conclu à un diagnostic de CHS, après avoir réalisé une analyse d’urine et/ou une échographie de l’appareil urinaire, ou bien, lorsque ces examens étaient refusés, lors de l’échec d’un traitement antibiotique empirique.

Résultats

L’étude a été réalisée sur 115 chiens remplissant les critères d’inclusion. Le premier groupe comprenait 66 chiens n’ayant pas reçu de furosémide en prévention, tandis que le groupe 2 comprenait 49 chiens traités avec du furosémide (0,5 à 1 mg/kg/j) pour prévenir la CHS.
Les chiens de cette étude présentaient principalement des carcinomes, des sarcomes, des mélanomes ou des lymphomes. Les doses de cyclophosphamide reçues (10 à 15 mg/m2/j) ne sont pas significativement différentes entre les deux groupes.
Dans le groupe 1, 30 p. cent des chiens ont développé une CHS, contre 10 p. cent dans le groupe 2, et cette différence était significative (p = 0,010). Les données cliniques d’évolution de la CHS étaient disponibles pour certains chiens. La durée médiane de l’affection était de 24 jours dans le premier groupe (10 à 218 jours), et de 34 et 61 jours dans le groupe 2. Les traitements consistaient en l’arrêt du cyclophosphamide associé à un antibiotique.
Dans cette étude, aucun facteur de risque n’a été identifié au seuil de significativité de 0,05.

Discussion / Conclusion

Dans cette étude, l’incidence des CHS chez les chiens recevant du cyclophosphamide métronomique est significativement réduite, lorsque du furosémide est associé au traitement. L’effet bénéfique du furosémide a déjà été montré chez le chien recevant du cyclophosphamide aux doses maximales tolérées.
Par son effet diurétique, le furosémide réduit le temps de contact entre les métabolites toxiques et la paroi vésicale. D’autres études ont montré des effets similaires avec les glucocorticoïdes.
Le traitement de la CHS consiste en l’arrêt du cyclophosphamide associé à d’autres molécules pour soulager la douleur et l’inconfort comme les glycosaminoglycanes, l’amitriptyline, ou les anti-inflammatoires non stéroïdiens.
Cette étude n’a pas mis en évidence de facteurs de risque, alors que certains sont maintenant bien connus lorsque le cyclophosphamide est donné aux doses maximales tolérées pour le traitement de certains cancers chez le chien. Ainsi, une dose et une fréquence d’administration élevées, la voie intraveineuse, l’administration chronique, le sexe femelle, la présence d’autres maladies et la déshydratation augmentent le risque de développer une CHS.
Les principales limites de cette étude sontdues à son design rétrospectif. Les traitements (doses de cyclophosphamide), et les modalités de diagnostic de CHS sont variables, les groupes n’ont pas été effectués au hasard. Un autre biais peut être dû à l’observance du propriétaire.
Les résultats de cette étude encouragent le praticien à utiliser le furosémide en prévention des CHS lors de chimiothérapie métronomique avec du cyclophosphamide, et à effectuer régulièrement des analyses d’urines pour mieux les surveiller et les prendre en charge.
Modifié le: vendredi 7 décembre 2018, 15:57