La relative complexité des structures nerveuses et organiques impliquées, l’ubiquité des afférences émétisantes expliquent la richesse de la physiopathologie du vomissement et la multiplicité des situations pathologiques à l’origine de ce signe si fréquent. Il demeure un signe parmi d’autres quand il est accompagné d’autres symptômes digestifs ou non, mais il peut être le seul signe rapporté par le propriétaire et constitue alors un véritable syndrome.
Les modalités d’apparition d’une part, d’évolution d’autre part, font qu’on oppose classiquement les vomissements aigus aux vomissements chroniques ; ceci constitue une première embûche pour le clinicien qui peut oublier que l’apparition brutale d’un symptôme peut parfois correspondre à l’émergence clinique d’une affection évoluant déjà sur le mode chronique. C’est alors que l’anamnèse, complétant valablement les commémoratifs, est extrêmement importante à considérer. La description précise des troubles doit permettre d’affirmer l’existence de réels vomissements et d’en décrire toutes les caractéristiques ainsi que de statuer sur le contexte clinique.
Le deuxième piège pour le clinicien confronté à des vomissements d’apparition brutale est de ne pas passer à côté de certaines situations cliniques. En premier lieu, il est impératif de ne jamais négliger les causes alimentaires. Ensuite, les vomissements font souvent partie du cortège symptomatique de certaines maladies infectieuses ; avec les caractéristiques d’être très fréquents, incoercibles, d’odeur nauséabonde, ils doivent faire évoquer une interruption du transit, qu’ils soient dus à une obstruction ou à une occlusion ; observé dans certaines races comme le Berger belge, le Chow-chow, ils doivent également faire penser, en toile de fond, à une étiologie tumorale. Le clinicien ne doit pas non plus négliger toutes les affections non digestives qui peuvent expliquer l’apparition de vomissements ou ne considérer que les atteintes de l’appareil digestif proximal, oubliant que les colopathies se traduisent souvent par des vomissements en plus de leur traduction clinique plus spécifique. D’autres affections comme les troubles nerveux sont souvent oubliées aussi comme responsables de vomissements, par exemple les atteintes vestibulaires ou certaines atteintes encéphaliques.
Le troisième et dernier piège réside dans la facile utilisation de l’arsenal thérapeutique disponible, sans discernement, et surtout, sans diagnostic étiologique définitif. La longue enquête sémiologique peut aboutir à l’évocation de vomissements sans cause identifiée mais, dans ce cas, une surveillance clinique doit être instaurée pour éviter de reconnaître l’affection responsable trop tardivement pour proposer un traitement causal adapté et efficace. Mention au passage doit être faite du mal des transports qui constitue souvent un motif de consultation fréquent et pour lequel une approche comportementale peut s’avérer nécessaire et justifiée.
Les molécules utilisables pour le traitement symptomatique des vomissements ont des propriétés pharmacologiques à connaître pour une utilisation optimale et judicieusement différenciée, en évitant les courts-circuits, en parfaite connaissance des effets attendus mais aussi des effets secondaires éventuels. Ainsi, tenant compte de tous ces éléments, en reconnaissant qu’il est bien difficile de ne proposer qu’une seule démarche diagnostique devant des vomissements d’apparition aiguë, et en se souvenant qu’il s’agit tantôt d’un symptôme, tantôt d’un syndrome, le clinicien doit d’abord et avant tout se souvenir de la physiopathologie et y revenir pour asseoir sa démarche diagnostique devant la singularité du cas clinique qu’il prend en charge, en raisonnant simplement mais de façon exhaustive afin de ne rien omettre.
Parce qu'il existe des particularités spécifiques au chat, ce dossier du NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE canine-féline consacre un article à cette espèce. Mais, la démarche diagnostique face à cette situation est commune au chien et au chat. Elle est abordée dans un article qui nécessite de se référer à celui traitant de la physiopathologie pour en comprendre toutes les subtilités. Le lecteur retrouve ensuite les différents moyens d'investigation complémentaire, biologiques et instrumentales parmi lesquelles la radiographie trouve encore quelques lettres de noblesse aux côtés de l'échographie, et bien sûr l'endoscopie, instrumentation reine en gastroentérologie. Enfin, aussi bien sur les bases de la démarche clinique que sur la compréhension des mécanismes intimes des vomissements, l'arsenal thérapeutique est présenté en insistant sur le fait que le seul traitement symptomatique des vomissements en général, aigus en particulier, est le plus souvent insuffisant et que l'affection émétisante responsable justifie souvent l'instauration d'autres mesures thérapeutiques. ❒
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