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La mort subite survient, par définition, sans aucun prodrome ou est précédée de signes cliniques de très courte durée (quelques minutes). Ainsi, pour parler de mort subite, il est nécessaire que le cheval ait été observé au moment de la mort. Considéré comme rare, cet événement représente cependant 9 p. cent des cas de mortalité examinés au laboratoire de pathologie équine de l’Anses*. Les morts d’animaux qui semblaient en bonne santé lorsqu’ils ont été vus pour la dernière fois sont souvent regroupées avec les morts subites. Pour cette catégorie de cas, le terme de “mort inattendue” est plus approprié, et les causes de mortalité associées sont bien plus nombreuses que lors de mort subite vraie, car la durée de l’évolution clinique peut atteindre plusieurs heures. Face à une mort subite ou inattendue, établir le diagnostic est une démarche complexe qui doit être menée avec d’autant plus de rigueur que le cheval est assuré en mortalité, qu’une recherche de responsabilité est engagée ou qu’un acte de malveillance est suspecté. Contrairement aux autres cas de mortalités, le vétérinaire ne peut pas s’appuyer sur le contexte clinique pour orienter la démarche diagnostique, de sorte que toutes les autres sources d’informations doivent être soigneusement explorées. Les données portant sur les circonstances immédiates de la mort (lorsqu’un témoignage est disponible), la localisation et la position du cadavre, son environnement, les conditions de vie, d’alimentation et d’abreuvement de l’animal ou les conditions météorologiques au cours de la période entourant la mort prennent une importance particulière et doivent être collectées de manière exhaustive. Des mesures conservatoires sont également prises à ce stade (prélèvements d’aliment, litière, flore, réalisation de photographies, …). En effet, lorsqu’un cheval meurt brutalement, notamment à l’herbage, alors qu’il avait pu être observé et jugé en bonne santé peu de temps avant, le propriétaire ou le détenteur sont souvent amenés à suspecter une intoxication. Les investigations conduites en amont de l’autopsie permettent, dans un contexte de suspicion d’intoxication, de prendre l’avis du CNITV**, puis de réaliser des prélèvements adaptés sur le cadavre et d’orienter les recherches toxicologiques ultérieures. Cette première étape de la démarche diagnostique est suivie de la réalisation d’une autopsie complète. Avant d’aborder l’autopsie, le vétérinaire doit connaître les principales causes de mort subite, car elles diffèrent des causes de mortalité enregistrées habituellement, et varient selon le mode de vie ou d’utilisation de l’animal. Ainsi, certaines causes de mort subite affectent spécifiquement des chevaux à l’herbage comme les intoxications végétales, le foudroiement ou la myopathie atypique et d’autres, les chevaux de course, comme l’hémorragie pulmonaire d’effort ou la défaillance cardiaque liée à l’effort. Des études récentes ont permis d’explorer la physiopathologie des défaillances cardiaques en relation avec l’exercice, mettant en lumière le rôle d’arythmies ventriculaires, souvent subcliniques et intermittentes. Des échecs diagnostiques peuvent être rencontrés, même si la plupart des causes de mort subite sont aisément identifiées grâce à la mise en œuvre d’un protocole complet d’autopsie incluant, entre autres, un examen soigneux du rachis, du crâne et du système nerveux central. Ils concernent, en particulier, les cas de défaillance cardiaque consécutive à des troubles du rythme. Fréquemment, aucune lésion cardiaque macroscopique n’est observée et tout au plus, une suspicion peut être formulée en présence d’un contexte évocateur (survenue au cours ou juste après l’effort, ou la saillie pour l’étalon), de lésions associées compatibles avec cette hypothèse étiologique, et en l’absence de lésion pouvant traduire une autre cause de mortalité. Les cas de mort subite suscitent très souvent des émotions particulières chez les détenteurs ou les propriétaires de chevaux : incompréhension et chagrin pour les chevaux de loisir, crainte d’une menace occulte pour les autres animaux du cheptel, … Quelles que soient les motivations de son client, le vétérinaire traitant doit tout mettre en œuvre pour tenter de répondre à ses demandes d’explication. Il trouvera dans ce dossier spécial du NOUVEAU PRATICIEN vétérinaire équine des éléments utiles pour le succès de sa démarche diagnostique. ❒
NOTES * Anses : Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail ** CNITV : Centre national d’informations toxicologiques vétérinaires
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