Ce numéro du NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE canine-féline est consacré aux pyodermites du chien et du chat, ou, plus précisément, aux pyodermites bactériennes. En effet, au sens strict (étymologique), les pyodermites sont les affections de la peau caractérisées par la présence de pus. Bien que l’usage courant du terme “pyodermites” désigne les infections cutanées à bactéries pyogènes, sens où nous l’entendons dans tous les articles de ce numéro, la relation entre ces deux termes, pyodermite et bactérie, n’est pas univoque. Car toutes les infections bactériennes cutanées ne sont pas cliniquement suppurées et, inversement, toutes les affections cutanées suppurées ne sont pas d’origine bactérienne (dermatite virale, leishmaniose pustuleuse, protothécose), ni même d’origine infectieuse (pemphigus).
Bien que d’importance très inégale entre ces espèces, les pyodermites présentent, chez le chien et chez le chat, des aspects justifiant que l’on s’y intéresse.
- Chez le chien, elles sont connues depuis fort longtemps puisque Charles Leblois, en 1926, décrivait la staphylococcie simple, la staphylococcie phlegmoneuse, la fibro-staphylococcie des grands chiens, la staphylococcie fistuleuse digitale et l’impétigo élémentaire du chiot [1]. La classification, utilisée actuellement, est plus récente et apparaît vers la fin des années 70 [2]. Elle distingue, en fonction de la profondeur atteinte par l’infection, les pyodermites de surface, les pyodermites superficielles et les pyodermites profondes.
Cette classification clinique est d’une grande aide pour le clinicien car elle permet :
1. de reconnaître le type de pyodermite auquel il est confronté car chaque type possède des lésions évocatrices ;
2. grâce à une bonne corrélation anatomo-clinique, d’émettre un pronostic (la gravité augmente avec la profondeur de l’infection) ;
3. d’envisager le traitement le plus adapté.
Récemment, de nouvelles entités cliniques telles que le syndrome de prolifération bactérienne de surface, la pyodermite cutanéo-muqueuse ou la fasciite nécrosante ont enrichi la liste, déjà longue, des pyodermites. Mais, si les connaissances progressent, l’étiologie et la pathogénie de certaines pyodermites connues depuis longtemps restent obscures, telles que la folliculite des chiens à poil court ou la cellulite idiopathique du Berger allemand.
- Chez le chat, les pyodermites se bornaient aux abcès et à l’acné. Mais leur liste s’est vue modifiée, soit par la description de nouvelles entités, soit par l’émergence d’entités déjà connues, mais rares ou exotiques. Ainsi, sont décrites, de plus en plus souvent, des mycobactérioses autochtones, mais aussi des pyodermites d’importation telles que la nocardiose.
Parallèlement à l’évolution des connaissances cliniques, se développent les connaissances bactériologiques. Ainsi, le genre Staphylococcus, anciennement limité aux espèces S. aureus, S. epidermidis et S. saprophyticus [3], compte maintenant, en plus des précédentes, S. intermedius, S. felis, S. hyicus, S. schleiferi, S. simulans et S. xylosus, pour ne parler que de celles rencontrées en dermatologie des carnivores domestiques ; de même, ont été découverts une flore bactérienne résidente dont le rôle est bénéfiqueà l’hôte, l’intervention de toxines et de super-antigènes dans la pathogénie des pyodermites et l’émergence de staphylocoques résistants à la méthicilline (M.R.S.A.).
L’ensemble de ces connaissances a permis de définir les principes d’une gestion rigoureuse de ces pyodermites. En plus du bon usage des antibiotiques, il convient de souligner que le traitement des pyodermites ne repose pas exclusivement sur l’antibiothérapie par voie générale. Toutes les pyodermites tirent bénéfice d’une tonte préalable des lésions, de l’usage de shampooings antiseptiques complétés par l’application de lotions hydratantes et de l’abstinence en corticoïdes ; certaines, localisées, peuvent être traitées à l’aide d’antibiotiques topiques. Ces principes, objet d’un “consensus”, doivent être respectés pour obtenir la guérison de la pyodermite, ou son contrôle au long cours, lorsqu’il s’agit de formes idiopathiques, et pour montrer que les vétérinaires sont conscients de leur rôle dans le bon usage des antibiotiques et dans la surveillance de ces M.R.S.A..
Il nous a paru intéressant enfin de faire le point sur le traitement d’un type de plaies, souvent à l’origine d’infections profondes (abcès, fasciite nécrosante), les plaies par morsure.
Puisse ce Dossier spécial vous persuader, s’il en est besoin, que les pyodermites restent la principale cause d'atteinte cutanée chez les carnivores domestiques. ❒