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Et si le bien-être animal n’existait pas, mais qu’il faille juste faire la chasse au mal-être ? En tout état de cause, ne serait-il pas plus juste, plus raisonnable, de prôner la bientraitance de nos animaux ? Le Bien-être animal est-il né d’un mal-être sociétal ? Certainement. Le bien-être animal réside en partie dans une définition précise du bien vivre ensemble. Nous ne devons pas être seulement heureux pour eux, mais surtout être heureux avec eux. Or, ce n’est pas si simple.
Années 80, l’industrialisation de l’élevage commence à être montrée du doigt. La protection animale s’organise et la notion de bien-être animal se construit. Les conditions d’élevage interrogent. Et si de mauvaises conditions d’élevage pouvaient faire prendre un risque aux consommateurs ? Et si le consommateur inquiet ne consommait plus ? Les ingrédients sont réunis pour que les lobbys s’affrontent. La production et la consommation. Pourtant, ils ne peuvent vivre l’un sans l’autre. Ils n’existent pas l’un sans l’autre. L’élevage industriel est aussi montré du doigt aujourd’hui pour sa consommation antibiotique. Et là, à nouveau deux mondes s’affrontent et se rejettent la faute. L’antibiorésistance, c’est l’autre. Bourgelat et Hippocrate se défient. Ils ont fait des efforts. Bourgelat a été bon élève ; pour Hippocrate, la tâche est difficile mais il a des vraies excuses, il doit sauver Bourgelat. Mais c’est ensemble qu’ils progresseront. Car si on ne peut plus soigner les animaux correctement contre les infections au nom de la santé humaine, nous ne pourrons garantir leur bien-être. Et si l’animal souffre, c’est notre mal-être que nous entretenons.
L’antibiorésistance prendrait-elle naissance dans nos élevages, et/ou chez nos animaux de compagnie ? Et si c’était plutôt un effet collatéral inéluctable de l’utilisation des anti-infectieux des médecines en général qui, dans un mouvement perpétuel des populations mondiales, contamineraient par ses effluents la nature dans laquelle nous vivons. Nature, dans laquelle nous vivons, où nos animaux sont élevés, que eux et nous pouvons enrichir de germes antibiorésistants et où, eux et nous pouvons contracter des bactéries ayant développé une résistance aux antibiotiques. C’est ainsi que la notion du “One Health” prend tout son sens. La résistance antibiotique nait d’un déséquilibre. Plus nous réduisons l’utilisation d’antibiotique, plus nous restaurons un équilibre gérer propre à mieux contrôler l’antibiorésistance.
Ce numéro du NOUVEAU PRATICIEN vétérinaire équine propose deux mises au point sur les endométrites infectieuses post-saillies et infectieuses chez la jument et sur les endométrites dégénératives ou endométroses chez la jument par A. Tibary et L. K. Pearson (Washington State University) et un exemple d’amélioration de nos prescriptions en antibiothérapie, lors d’endométrite infectieuse chez la jument. Cet article-ci illustre l’évolution de nos pratiques qui permettent d’épargner la ressource antibiotique sans dégrader la bientraitance de la jument malade (voire en la soignant mieux) et sa fécondité, donc la rentabilité de l’élevage. Et l’animal dans tout cela ? Nous parlons à sa place. Nous essayons de définir ce qui lui va bien, ou plutôt nous tentons de définir pour lui, comment il doit être heureux avec nous. Mais la difficulté réside dans la conceptualisation scientifique du bien-être. Comment définir le bien-être d’un tiers sans vraiment savoir ce qu’il veut ? Nous vivons avec lui sans vraiment savoir s’il aspire vraiment à notre compagnie. Nous lui imposons des modes de vie parfois très éloignés de l’éthogramme et des besoins de son espèce, nous sommes déjà dans la maltraitance. Une révision de nos pratiques du mode d’hébergement, d’alimentation, de dressage et d’entraînement... serait un premier pas. Cet aggiornamento suppose de connaître des préférences non exprimables par l’animal individu ; la tâche apparaît immense, et peut-être, trop portée par une démesure (ubris) contemporaine dont l’ubiquité est quelquefois déraisonnable.
Et si nous définissions le mal-être ? La notion serait-elle plus rationnelle, plus quantifiable ? C’est un des fondements d’une de la médecine. Nous soignons les animaux pour leur redonner un état dit physiologique. L’animal malade s’éloigne de sa physiologie. Le vétérinaire s’évertue par ses soins à restaurer des paramètres physiologiques dans le cadre de normes. L’hospitalisation est un moment fort, où les soins sont intensifs, souvent motivés par une gravité des signes de maladie. Il est important dans ces moments d’éviter d’aggraver l’état de maladie par un état de mal-être induit. Reconnaître le mal-être provoqué par une hospitalisation, c’est déjà participer à la guérison. Un pas vers le bien-être ? Vous trouverez certainement des embryons de réponse dans ce numéro ... ❒
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