| Pour qui s’intéresse un tant soit peu à la physiologie comparée des espèces, le cheval se distingue dans le règne animal comme un athlète de très, très haut niveau, aux capacités sportives tout à fait exceptionnelles. Les plus darwinistes diront que ce sont des millénaires de fuite en avant qui ont sculpté son anatomie et contribué à améliorer ses prouesses athlétiques. À un moment de l’histoire, les destins du cheval et de l’homme ont fusionné et ils se sont mutuellement conquis, pour partager une symbiose insolite. Depuis, l’évolution du cheval a été façonnée par les besoins de l’Homme. A partir des qualités propres à chaque race, il a cherché à en exprimer le meilleur. La performance sportive revêt la définition que la discipline pratiquée lui assigne. Si la qualité du geste est un gage de performance en dressage ou en obstacle, comme l’est la vitesse en course, son accomplissement dépend de la pleine expression d’un ensemble d’autres qualités finement accordées. Celle de compenser ses faiblesses en est une bien précieuse, qui peut éviter de tomber dans la contre-performance.
Le cheval contre-performant est rarement un cheval “malade“, dans le sens où il ne manifeste pas de signes cliniques évidents, autres qu’une baisse de ses performances au travail ou en compétition. Le praticien doit résoudre la difficile énigme de l’origine du défaut de performance : est-ce le développement d’une affection et laquelle ? Est-ce un manque de qualités du cheval ? Est-ce un signe de surentraînement ou de fainéantise, - s’ils existent - qui pourrait s’exprimer ? Il lui faut alors rechercher des signes cliniques subtils, souvent absents ou frustes lors de l’examen au repos, et déterminer lequel constitue réellement un facteur limitant la performance. En février dernier, à l’initiative de notre confrère Youssef Tamzali, l’école Nationale Vétérinaire de Toulouse rassemblait des praticiens, conférenciers et participants, pour une journée autour du thème de la contre-performance du cheval de sport. De la nutrition au système locomoteur en passant par le dopage, les conférences ont permis de faire le tour des sujets relatifs à la performance. Toutes ont montré qu’un cheval de sport contre-performant s’examine aussi à l’effort. C’est dans ce même esprit que ce Dossier spécial compléte les conférences de cette journée de formation.
Notre but : guider le praticien afin d’établir le bon diagnostic chez le cheval examiné pour contre-performance, et ouvrir de nouvelles perspectives d’investigation et de traitement.
Les affections de l’appareil locomoteur sont la cause majeure de contre-performance et d’interruption de travail chez les chevaux de sport. Dans ce numéro, les contre-performances d’origine locomotrice sont abordées sous l’angle du saut d’obstacle, une discipline de plus en plus technique, qui sollicite fortement le système myo-arthro-squelettique. Les chevaux doivent y exprimer toutes leurs qualités de souplesse et de vitesse, sous la bonne conduite du cavalier. R. Perrin et Ph. Benoit, qui suivent la carrière de chevaux de haut niveau, partagent ici leur longue expérience en la matière et mettent en exergue l’importance de l’observation des gestes du cheval et du cavalier au travail. Bien gérer la carrière sportive d’un athlète équin, c‘est aussi respecter la physiologie du cheval. Les chevaux vivent dans des conditions parfois très éloignées de leur milieu naturel, ce qui peut engendrer le développement de troubles digestifs ou respiratoires. Les nombreuses études épidémiologiques sur la prévalence des ulcères gastriques publiées ces dernières années montrent qu’aucune discipline n’est à l’abri, alors que des moyens de gestion simples pourraient être mis en place pour les prévenir.
Contrairement à l’Homme, le cheval est limité dans son effort par le système respiratoire. Ainsi, toute affection respiratoire supérieure ou inférieure peut avoir des répercussions significatives sur l’accomplissement d’une performance. Les articles de ce numéro du NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE équine proposent un tour d’horizon le plus complet possible de ces troubles respiratoires, souvent difficiles à diagnostiquer au repos. Sur le plan cardiaque, les chevaux sportifs peuvent manifester des souffles ou des arythmies physiologiques qu’il convient de distinguer des signes pathologiques. L’article de G. van Loon fait le point sur les éléments à prendre en compte et les pièges à éviter pour savoir si le système cardiovasculaire est responsable de la contre-performance.
Le "nouveau praticien" de ce numéro est donc un praticien de terrain qui aborde le cheval contre-performant de manière dynamique … pour progresser, sans tricher.
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