éditorial

L’examen locomoteur est un vrai défi de médecine générale, parfaitement adapté à la pratique
du vétérinaire équin polyvalent …

R. Perrin
Roland Perrin
Clinique Vétérinaire équine
18, rue des Champs
La Brosse
78470 Saint-Lambert-des-Bois


Les troubles de la démarche chez les équidés est un sujet intéressant car il nous incite à définir ces troubles, puis à placer leur diagnostic et leur traitement dans notre activité de vétérinaire équin. Une démarche d’après le Littré est “Le pas qu'on commence à faire quand on veut aller en quelque lieu ou en sortir”, ce mot a pour synonyme allure.
Or, l’allure a de nombreux synonymes ayant une relation avec la notion de rythme dans la locomotion : cadence, foulée, vitesse, enjambée, maintien, marche. On peut ainsi différencier une posture, où le corps de l’animal n’est pas en mouvement, d’une démarche où le corps de l’animal est en mouvement et rentre ainsi dans un “acte de locomotion” (cf. définitions).

Pour pouvoir déceler une démarche anormale, le clinicien analyse la locomotion du cheval, en essayant de détecter une anomalie ou des anomalies de la phase d’appui ou de soutien de chacun des membres. Pour cela, il s’intéresse à la cadence, à la longueur ou à l’amplitude de ces phases, puis une fois les anomalies mises en évidence, il utilise des tests cliniques ou des examens complémentaires pour les confirmer et essayer d’en comprendre la cause.
Pour se déplacer de manière harmonieuse, donc normale, le cheval utilise des muscles qui prennent appui sur un appareil ostéo-articulaire ; ces muscles sont correctement synchronisés dans leur mouvement, par le système nerveux tout à la fois sensitif (perception du corps dans l’espace ou proprioception) et moteur. Ils doivent avoir suffisamment d’énergie pour développer la force nécessaire au mouvement (le système aérobie est opérationnel : il implique la respiration et l’appareil cardiovasculaire).
Pour une anomalie locomotrice, l’affection peut se situer dans l’un ou l’autre de ces organes ; la sémiologie d’une démarche anormale est donc difficile. Les choses se compliquent encore, car le cheval ayant une démarche anormale, est obligé pour se déplacer, de développer des compensations qui permettent une locomotion la plus efficace possible.
S’il ne peut pas mettre en jeu ces compensations, il ne peut parfois plus se déplacer, le cheval est couché et ne peut plus se relever.

Le clinicien doit ainsi faire la part des choses entre l’origine de la démarche anormale et les compensations locomotrices. Le dernier élément qui entre en jeu est la douleur.
On pense généralement que seule la douleur ostéo-articulaire intervient dans la modification de la locomotion, pourtant, de très nombreux exemples nous prouvent le contraire.
Il est très facile de se tromper entre le diagnostic différentiel d’une fourbure aiguë des deux pieds antérieurs et d’une pleurésie aiguë, ou d’une adhérence d’un ovaire à la paroi abdominale et d’une affection dégénérative articulaire inter-tarsienne distale, ou encore d’une tendinite et d’une dermite aiguë du paturon.

Pour mettre en place un traitement efficace, le diagnostic doit être fiable, donc la sémiologie parfaitement maîtrisée. Pour appréhender les troubles de la démarche, le clinicien doit avoir, tout à la fois, de solides connaissances des affections ostéo-articulaires, et de l’ensemble des affections habituellement enseignées en médecine interne.
Généralement dans notre pratique, on différencie l’examen des troubles locomoteurs de la médecine générale. On vient par ces quelques phrases de montrer qu’il est impossible de le faire, tout est imbriqué. Le vétérinaire qui s’occupe d’affection locomotrice passe ainsi de la neurologie à la rhumatologie, de la dermatologie aux maladies infectieuses ou des maladies métaboliques à la cardiologie, et celui qui s’occupe de médecine interne doit connaître les affections ostéo-articulaires. L’examen locomoteur est finalement un vrai défi de médecine générale, parfaitement adaptée à la pratique du vétérinaire équin polyvalent.
Libre à lui de solliciter l’avis d’un spécialiste pour mieux appréhender le diagnostic ou le traitement de telle ou telle affection, mais c’est lui qui reste le maître d’œuvre.
L’approche diagnostique des démarches anormales est décrite, puis des affections plus ciblées sont abordées comme la myélopathie cervicale compressive, le harper, ou la maladie du neurone moteur, enfin une vue d’ensemble des affections musculaires, puis des affections neurologiques périphériques sont traitées. Malgré l’ampleur du sujet, les auteurs ont essayé d’être clair et synthétique afin de vous ouvrir la porte sur la complexité de l’examen et du traitement des affections locomotrices.
Ce dossier devrait intéresser au plus haut point le praticien généraliste.

Définitions
- Chez tous les animaux, la locomotion est définie comme un phénomène cyclique, faisant alterner une phase d’appui où un ou plusieurs membres sont posés sur le sol, et une phase de soutien où le ou les membres du cheval sont en l’air.
- La phase de soutien comprend trois étapes, le ramener ou rétraction, la suspension, l’embrassée ou protraction, la phase d’appui, l‘amortissement ou poser, le soutènement et la propulsion. Une foulée est ainsi la somme de ces six étapes.
- On distingue chez le cheval des allures symétriques (pas, amble, trot) et dissymétriques (galops à 3 et 4 temps).



Sauter N°15, volume 4, 2008

N°15, volume 4, 2008

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Test clinique - Diarrhée profuse chez un foal Sandrine Mesnil

CHEVAL ET ÉQUIDÉS
- Approche diagnostique face à un trouble de la démarche chez le cheval
Mickaël Robert, Jean-Luc Cadoré
- Diagnostic et traitement : la myélopathie cervicale compressive Christopher Stockwell
- Approche diagnostique des myopathies chez le cheval
Gaby van Galen, Didier Serteyn, Hélène Amory, Dominique-Marie Votion
- Diagnostic et traitement des atteintes nerveuses périphériques responsables des troubles de la démarche Thomas Launois
- Comment reconnaître une maladie du neurone moteur Olivier Bisseaud
- Chirurgie - Indications et réalisation du traitement chirurgical du harper chez le cheval Bruno Baup, Marie-Anne Hours

ÂNE, PONEY
- Le comportement sexuel du baudet Ahmed Chabchoub, Ahmed Tibary

RUBRIQUES
- Observation clinique - Un abcès de cornée chez la jument Thomas Dulaurent, Jean-François Régnier
- Chirurgie - Les hernies inguinales en clinique chez le cheval Christian Bussy

REVUE DE PRESSE INTERNATIONALE
- Rubrique dirigée par Jean-Luc Cadoré et Louis-Marie Desmaizières
- Un panorama des meilleurs articles d’équine : notre sélection par Florence Bouldouyre, Zoé Burnet, Claire de Fourmestraux, Marie-Anne Hours, Sophie Marchand, Caroline Marguet, Amélie Séna
- Synthèse - Adaptation de l’appareil locomoteur du poulain pur-sang à l’entraînement Nicolas Serraud

Test clinique - les réponses