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On avait fini par l’oublier mais la publicité pour le médicament vétérinaire est réglementée.
C’est l’Agence nationale du médicament vétérinaire (Anmv), incorporée à l’Anses*, qui est théoriquement chargée de veiller au respect d’une réglementation, lentement tombée dans l’oubli. En effet, la banalisation des annonces publicitaires pour le médicament vétérinaire s’est peu à peu généralisée, au fur et à mesure de l’extension des listes permettant sa commercialisation sans prescription, quelle que soit l’espèce cible. Ainsi, après les revues destinées aux éleveurs professionnels de porcs, de volailles, de lapins, de vaches laitières et allaitantes, …, grâce à l’extension sans fin de l’historique “liste positive” ; la publicité pour le médicament vétérinaire a conquis les revues destinées aux amateurs et aux passionnés de chiens, chats, chevaux et autres nouveaux animaux de compagnie avant d’atteindre la télévision pour quelques grands produits antiparasitaires externes, notamment. Bien sûr, il est devenu de plus en plus difficile d’y faire figurer de façon lisible la longue liste des mentions obligatoires qui doivent accompagner, réglementairement, toute publicité. Logiquement, elles ont donc été de plus en plus souvent disjointes ou déplacées loin du “visuel”.
Les “Publi-Reportages” ont fleuri tout comme la publicité rédactionnelle ; on a pu ainsi voir dans des revues destinées aux éleveurs professionnels des messages de promotion dédiés à la seule image d’une société détentrice de multiples AMM. Cette analyse ne suggère pas que les revues destinées aux non vétérinaires soient seules à commettre des erreurs vis-à-vis du respect d’une réglementation qui, non mise en œuvre, a fini par ne plus exister aux yeux de ceux et de celles qui participaient, d’une façon ou d’une autre, à l’activité générée par la publicité. Néanmoins, on ne peut s’empêcher de penser que la capacité à décrypter le message publicitaire dans un cadre, de facto, dérégulé, n’est pas tout à fait la même chez un lecteur pour qui le médicament vétérinaire est un outil professionnel, d’emploi quotidien, étroitement encadré, et chez celui pour lequel il représente un usage occasionnel et marginal.
Qu’on le veuille ou non, la publicité véhicule en effet une information qui est interprétée en fonction de la formation, de l’expérience et des références de celui ou de celle qui constitue sa cible. A ce titre, elle a complètement sa place dans les revues de formation continue et d’information destinées aux vétérinaires, où elle occupe une place (de plus en plus) réduite au sein d’un ensemble dont l’indépendance et la qualité sont assurées par les procédures des comités de lecture et l’engagement des rédactions, reconnues par le CNVFCC**. Elle participe à l’équilibre économique de ces revues, indispensables au “développement professionnel continu”, combinant formation continue académique et professionnelle, nouvelle frontière de l’adaptation au progrès et aux évolutions des connaissances et des pratiques.
La publicité constitue donc un lien à bénéfice réciproque entre l’industrie pharmaceutique vétérinaire et la profession. Pour qu’il le reste, il convient que chacun puisse adopter un comportement éthique le garantissant. En ce sens, le respect d’une réglementation simple, efficace, mise en œuvre avec bon sens et réalisme, réellement garantie par la puissance publique est probablement, le meilleur encouragement à bien faire. Il permettra de sortir par le haut de la situation actuelle, insatisfaisante pour tous et porteuse de crise comme la récente “affaire du Médiator” l’a montré. C’est en ce sens que trois décisions de l’Anmv, deux en date du 18 mai 2011 et publiées au JO du 24 juillet dernier, la troisième du 28 juin publiée au JO du 26 juillet, méritent une attention soutenue puisqu’elles semblent annoncer un retour d’attention vis-à-vis de ce sujet trop longtemps négligé. L’Anmv a donc interdit en mai dernier deux publicités concernant les différentes présentations d’un antiparasitaire externe, l’une concernant leur usage chez le chat, l’autre chez le chien. Si les motifs d’interdiction sont classiques, il est beaucoup plus intéressant de constater que les supports incriminés sont, d’une part, le site internet d’un confrère, d’autre part, un document “remis de visite”, probablement destiné aux visiteurs médicaux. La troisième décision concerne un anti-inflammatoire destiné aux chevaux, elle ordonne la diffusion d’un rectificatif “considérant que les termes de ce document publicitaire sont de nature à tromper l’utilisateur sur ses indications et ses restrictions d’emploi“. Ces premières interventions devraient logiquement être suivies par beaucoup d’autres, surtout si l’on s’achemine pour la publicité vétérinaire vers la situation qui devrait prévaloir, après le vote d’une nouvelle loi, pour le médicament destiné à l’homme où la publicité dans ce secteur serait contrôlée préalablement à son insertion, comme cela avait été tenté pour le médicament vétérinaire à la fin des années 80. Notons que ces décisions sont publiées au JO au titre du Ministère du travail, de l’emploi et de la santé, ce qui n’est pas sans importance.
NOTES *Anses : agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail **CNVFCC : Conseil National Vétérinaire pour la Formation Complémentaire et Continue
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